2 000 bénévoles pour sauver une église vieille de 1000 ans en 33 ans

Un beau post trouvé sur Boulevard Voltaire.

L’aventure de La Chapelle-Basse-Mer a commencé au cours d’une promenade. Un vieux prêtre, ami de ma grand-mère, Henri Maisonneuve, me signale qu’au milieu d’un roncier se trouvait une petite chapelle dans le village de La Chapelle-Basse-Mer, ma commune natale. À l’époque, je suis en train de rédiger ma thèse de troisième cycle dont le sujet est la commune en question. Enfant du pays, je pars à la découverte du patrimoine local. Au cours de mes investigations, j’arrive un jour devant une vaste broussaille. Je me glisse sous les ronces et me retrouve au milieu d’un édifice en ruine, menaçant de s’effondrer d’un moment à l’autre. Je suis en face de la première église de La Chapelle-Basse-Mer, vieille de plus de mille ans, que la mairie a décidé d’abattre pour des raisons de sécurité.

J’ai le coup de foudre pour cette ruine car je ne peux accepter cette destruction, cet effacement irréversible. Immédiatement, je décide de sauver l’édifice, tâche folle mais je suis fol amoureux. Je me dis que mille ans d’Histoire méritent bien un tel coup de tête.

Le 13 mai 1992, j’achète ce tas de cailloux, comme l’appelle le notaire, à onze copropriétaires pour le prix d’un franc symbolique que le notaire tient à payer personnellement : beau geste et beau présage. Puis, une heure après la signature de l’acte, à genoux devant la grande porte romane effondrée, je fais le serment à la Vierge Marie de lui restaurer « sa chapelle » tout en sollicitant son aide : un coup de pouce d’en haut se révèle toujours bénéfique.

C’est le début d’une longue épopée que je ne pouvais imaginer

Tout d’abord, il m’a fallu apprendre à donner du temps. Pour moi, cela s’est concrétisé par le don d’un mois et demi, au minimum, par an pour gérer les chantiers de restauration et de reconstruction, une véritable dîme moderne.

Ensuite, il m’a fallu créer des équipes sur la durée : en trente-trois ans, ce sont plus de deux mille jeunes et moins jeunes (16 à 88 ans) « gars du chantier » qui vont se succéder sur le site, venus du monde entier. Je tiens à préciser que la France possède une jeunesse exceptionnelle, celle dont on ne parle jamais, généreuse de son temps, riche de talents les plus divers et les plus incroyables et en même temps les plus précieux.

Quant aux moyens, il m’a fallu faire preuve d’imagination, avoir de l’audace, de la ténacité et une bonne dose d’humilité.

D’un point de vue financier, j’ai dû être créatif afin de collecter les fonds nécessaires à un tel projet. C’est pourquoi j’ai donné des conférences dans le monde entier. J’ai évidemment pu compter sur mes parents proches et lointains, mes amis, mes connaissances, des mécènes occasionnels ou sur le long terme : le miracle est toujours là, même si parfois il se fait désirer.

D’un point de vue matériel, au sens large du terme, c’est-à-dire pour trouver les outils, matériaux, logements, nourriture, il y a toujours des solutions, parfois inattendues, mais elles sont là. Souvent, cela nécessite beaucoup de persévérance : j’ai acquis dans ce domaine une solide expérience car la générosité est partout, il suffit de la susciter à bon escient.

230e anniversaire de la fin du passage des colonnes infernales

Trente-trois ans plus tard, non seulement l’église a été restaurée, mais le prieuré original avec ses cryptes, son cloître et ses différentes salles a été recréé.

Aujourd’hui, il ne reste plus qu’à trouver les financements pour quatre vitraux sur six et la sculpture en marbre de Carrare de quatre bustes sur huit des chefs vendéens qui garniront la salle principale.

Cet ensemble a désormais fière allure et est devenu un mémorial en souvenir de l’extermination et de l’anéantissement de la Vendée militaire. Le 11 mai prochain, en ses murs, sera célébré le 230e anniversaire de la fin du passage des colonnes infernales en Vendée et le rappel du général Turreau, lequel a conçu et mis en œuvre le troisième plan d’extermination et d’anéantissement avec l’accord du Comité de salut public.

Outre cette œuvre gigantesque demeure l’aventure humaine, une incroyable aventure, laquelle a été à l’origine d’un réseau d’amitiés profondes qui, entre autres, s’est traduit par soixante-seize mariages, des bouleversements de vie tant au niveau spirituel que professionnel, des sauvetages humains inespérés. Grâce à l’expérience acquise, des dizaines de bâtiments historiques, à travers le monde entier, ont été restaurés par ces jeunes, plus de mille cent croix de cimetières préservées de la destruction et réérigées, des centaines d’objets et de vêtements religieux sauvés et donnés à qui de droit.

Si nous avons la volonté et le courage de nos actes, tout rêve, tout projet devient possible pour que la mémoire vive.

Reynald Secher
Docteur ès lettres, président de l’association « Mémoire du futur de l’Europe »

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