Entretien de Michael J. Matt avec Monseigneur Carlo Maria Viganò

Via Media-Presse Infos :

Alors : s’il y a conspiration, pourquoi devrais-je me taire ? Et s’il n’y en a pas, pourquoi se soucient-ils tant des paroles d’un Archevêque âgé ?

Beaucoup de catholiques croient aujourd’hui que la Sainte Mère l’Église traverse la pire crise de l’Histoire, qui dépasse même celle de l’hérésie arienne. Pensez-vous que cela soit ainsi ?

Je ne peux pas dire si cette crise est la pire à laquelle l’Église devra faire face d’ici la fin des temps ; c’est certainement la pire à ce jour, tant pour la proportion dévastatrice de l’apostasie que pour la narcotisation du bas Clergé et des fidèles envers la Hiérarchie. En d’autres occasions, la persécution a été plus féroce, mais elle a trouvé une résistance chez les Évêques et une opposition chez les Catholiques, qui pouvaient considérer le Siège de Pierre comme le phare de la Vérité et un obstacle à l’établissement du royaume de l’Antéchrist. Aujourd’hui, le katèchon a disparu, au moins temporairement, et le Siège apostolique est occupé par un ennemi déclaré de l’Église du Christ.

Jamais dans l’Histoire nous n’avons été témoins d’une trahison systématique de la Foi, de la Morale, de la Liturgie et de la discipline ecclésiastique, favorisée et même promue par l’Autorité suprême de l’Église elle-même, dans le silence complice de la Hiérarchie et dans l’acceptation acritique de nombreux clercs et fidèles. La gravité de cette situation est exacerbée par le fait que le travail de dissolution de l’église profonde avance en synchronisation avec l’action subversive de l’État profond dans les nations, faisant des fidèles catholiques l’objet d’une double attaque, en tant que fidèles et en tant que citoyens.

Ces deux réalités, désormais indiscutables, ont en commun la haine inextinguible de Satan envers le Christ, son Église, sa Sainte Loi, envers la Civilisation chrétienne. Cette tromperie est si évidente qu’elle ne peut plus être qualifiée de « théorie du complot ».

Si nous y réfléchissons, il est troublant que les protagonistes de ce plan criminel – tant dans les gouvernements que dans l’Église – soient issus de cet environnement radical chic dans lequel le progressisme conciliaire « catholique », le pacifisme, l’écologisme, l’homosexualité et tout le répertoire de la gauche woke sont nés et ont grandi depuis les années soixante. Comme je l’ai déjà dit, les évêques individuels et toute la Hiérarchie de ces dernières décennies devront répondre devant Dieu et l’Histoire de leur complicité dans cette crise, et même d’en avoir été en quelque sorte les inspirateurs et les partisans, abdiquant le rôle de l’Église de Domina Gentium.

Qu’est-ce qui a convaincu Votre Excellence d’adhérer à la contre-révolution catholique traditionnelle ? 

Quel fils regarderait impassiblement l’humiliation de sa mère, laissant ses serviteurs l’exposer à l’infamie et à la vitupération, la dépouiller de la triple couronne et des vêtements royaux, voler ses bijoux et vendre ses biens, la forcer à vivre avec des voleurs et des prostituées, même lui enlever son titre royal et l’abandonner à la dégradation ? Et quel citoyen d’une nation glorieuse la laisserait être détruite par des dirigeants traîtres et des fonctionnaires corrompus, sans se lever, sans prendre les armes pour lui rendre l’honneur qui lui a été enlevé ?

Si cela est valable dans l’ordre de la nature, c’est encore plus vrai et pressant quand il s’agit de la Sainte Église, assaillie par des ennemis qui la frappent non seulement dans les choses temporelles mettant à l’encan les églises, les objets et les meubles sacrés – comme ils l’ont toujours fait à travers l’Histoire – mais aussi dans ses biens surnaturels, dans les trésors dont le divin Roi l’a dotée pour la sanctification des âmes, dans les richesses incorruptibles de sa doctrine et de sa liturgie. Des ministres corrompus l’ont exposée au scandale, ont falsifié son enseignement, dispersé son armée et démoli les murs qui la défendaient des incursions ennemies. Les âmes qui, grâce à l’Église, ont été protégées et accompagnées sur le chemin terrestre vers l’éternité, ont été refoulées et perdues : des âmes pour lesquelles Notre Seigneur a versé son Sang et que ses ministres infidèles ont abandonnées et chassées de l’enceinte sacrée.

Rester là et regarder l’outrage dont notre Sainte Mère Église est objet n’est pas moins grave que d’avoir été parmi la foule qui a assisté à la Passion et à la Crucifixion de Notre Seigneur, parmi les cris et les crachats des voyous ; parce que nous sommes enfants de Dieu comme nous sommes enfants de l’Église qui, par les mérites de Jésus-Christ, nous restaure dans la Grâce et fait de nous des héritiers du Royaume des Cieux.

Au début, il y a soixante ans, il semblait que c’était l’Église elle-même – après les événements tragiques de la Seconde Guerre Mondiale et les horreurs des dictatures – qui voulait presque se dépouiller de son passé pour atténuer en quelque sorte l’abîme entre ce qu’elle était restée et ce qu’était devenu le monde. Cette spoliation apparaissait comme un geste d’indulgence pour la société bouleversée par les révolutions et la fin des monarchies catholiques, sur la vague de cette démocratie que nous croyions pouvoir être chrétienne, tout en sachant bien que ses « valeurs » étaient substantiellement opposées à la vision transcendante du pouvoir propre au credo catholique. Peu d’entre nous, dans ces années-là, ont compris que la révolution conciliaire subvertirait l’ordre divin, renverserait le kosmos en jetant l’Église dans le chaos, donnerait libre cours à l’hérésie, démolirait l’orthodoxie, accepterait la corruption des mœurs en remplacement de la vertu et de l’honnêteté.

Ce processus subversif – evertere en latin signifie précisément renverser – a amené au sommet de la Hiérarchie ceux qui n’auraient jamais dû y être admis, et a emblématiquement chassé ou marginalisé ceux qui jusque-là étaient estimés et respectés. Ce fut le destin de tant d’évêques et d’une infinité de prêtres, de clercs, de religieux et de religieuses, à qui la Révolution a été imposée, la présentant comme un aggiornamento qui aurait dû donner lieu à ce « printemps conciliaire » annonciateur d’un renouveau de la Foi chez les peuples prostrés par un siècle de conflits sanglants.

Beaucoup ont cru de bonne foi que ce que le cardinal Suenens avait présenté avec enthousiasme comme « le 1789 de l’Église » n’était qu’une phase transitoire d’ajustement, à partir de laquelle le corps ecclésial renaîtrait plus fort et plus conscient. Ce ne fut pas le cas, comme nous le savons et comme nous l’avons constaté. La révolution conciliaire n’a pas été différente de celles qui ont fait tomber les royaumes temporels et démoli la société chrétienne : au contraire, elle représente l’accomplissement nécessaire d’un plan subversif conçu par un esprit diabolique qui frappe d’abord le corps mortel mais doit ensuite nécessairement frapper l’âme immortelle, et qui pour atteindre cet objectif dévaste d’abord la société civile et continue ensuite implacable contre la société religieuse.

Depuis le 13 mars 2013, la tumeur conciliaire a muté en métastases désastreuses. En tant qu’Évêque, en tant que Successeur des Apôtres, face à cette immense dégradation et humiliation de l’Église, j’ai dû élever la voix et prendre une position claire. J’exhorte mes Confrères à se réveiller à leur tour de la torpeur qui a fait d’eux des spectateurs silencieux de cette passio Ecclesiæ, et des complices de l’Ennemi. Levez-vous de vos chaires et criez la vérité sur les toits ! Et que les Évêques dits « conservateurs » cessent de défendre à tout prix le Concile Vatican II qui est la cause principale de ce massacre d’âmes qui crie vengeance au Ciel. Prenez position, avant d’être submergés par la ruine commune.

Célébrez-vous encore occasionnellement la Nouvelle Messe ?

Non, je ne célèbre plus le Novus Ordo depuis déjà quelques années, et je ne vois pas comment je pourrais revenir sur mes pas en acceptant de le célébrer même de temps en temps.

Je dois ma « conversion » à la Messe apostolique et à mon amour particulier pour le vénérable rite ambrosien, parce que j’y ai trouvé tout ce qui, pendant des décennies, avait été soustrait à mon Sacerdoce, le privant de sa source de doctrine, mais encore plus de spiritualité et d’ascétisme que l’on ne trouve que dans le Saint Sacrifice. Dans la Messe catholique, le célébrant est alter Christus non seulement en offrant en la personne du Christ, Souverain Prêtre, la Victime Immaculée à la Majesté du Père, mais aussi en étant mystiquement lui-même l’image du Christ Victime. Dans cette union intime avec Notre Seigneur réside l’âme même du Sacerdoce, le principe vital de l’apostolat, la regula fidei de la prédication, le pouvoir de la Grâce pour la sanctification des âmes. Et puisque sans Sacerdoce et sans Messe l’Église ne peut subsister, nous pouvons comprendre l’opposition farouche à la Messe et au Sacerdoce traditionnel par les ennemis du Christ, reconnaissant l’importance de notre choix et la nécessité de rester fidèles à ce trésor inestimable.

Revenir au rite montinien, après avoir reçu la Grâce de suivre le Seigneur sur le chemin du Calvaire grâce à la Messe traditionnelle, représenterait pour moi une trahison qui, contrairement à ceux qui ne connaissent pas ce rite vénérable, serait encore plus grave.

Et je voudrais rappeler ici que la question de la Messe de toujours ne s’épuise pas en une évaluation formelle et pour ainsi dire rationnelle. Elle représente la manière la plus parfaite dont le Corps Mystique rend hommage à la Très Sainte Trinité, mais aussi la voix avec laquelle l’Épouse s’adresse à l’Époux divin. Si, dans l’ordre naturel, une mariée ne peut concevoir quoi que ce soit qui diminue son amour pour l’époux, et de surcroît considère comme une offense de le diminuer ou de le mettre au même niveau que les autres hommes, avec quel courage une âme sacerdotale amoureuse de Dieu devrait-elle tolérer que les perfections de l’Époux soient réduites au silence ou niées pour ne pas offenser ses ennemis ? La Charité n’est pas tolérante, parce qu’elle ne connaît aucune mesure, elle ne conçoit pas de compromis. Il y a quelques jours à peine, à l’occasion du énième panthéon œcuménique au Kazakhstan, Bergoglio dénonçait le fondamentalisme comme nuisible au dialogue entre les religions et à la fraternité universelle : rien de plus étranger à la foi, rien de plus clairement cohérent avec la pensée maçonnique qui promeut la Religion de l’Humanité.

Bien que je comprenne la position difficile de tant de mes Confrères – évêques et prêtres – je ne peux que les exhorter à faire preuve d’une plus grande cohérence en cela, embrassant sans réserve et avec un véritable esprit surnaturel la Messe de toujours, qui constitue à elle seule l’arme la plus puissante contre la crise que traverse l’Église : nul ne peut servir deux maîtres.

Est-il exact de dire que l’obéissance – en tant que vertu naturelle (plutôt que théologale) – doit d’abord être au service de la Foi et que, en tant que telle, obéir à nos prélats modernistes en position d’autorité pourrait être un péché ?

L’obéissance est une vertu naturelle, à laquelle s’oppose la désobéissance (par défaut) et la servilité (par excès). Mais l’obéissance n’est pas due à quiconque, mais seulement à ceux qui sont constitués en autorité, et dans les limites qui légitiment l’exercice de celle-ci. Dans l’Église, l’obéissance est ordonnée à sa fin ultime, c’est-à-dire le salut des âmes dans l’unité de la Foi catholique. L’autorité établie pour garder la Foi ne peut pas légiférer contre elle, précisément parce qu’elle tire son pouvoir de la même source, c’est-à-dire le Dieu, suprême Législateur, qui ne peut pas être en contradiction avec Lui-même. Obéir à un ordre illégitime pour plaire à ceux qui exercent l’autorité corrompt l’obéissance, qui n’est plus obéissance mais servilité.

Je voudrais également souligner que ceux qui exigent aujourd’hui une obéissance aveugle, prompte et absolue de la part des fidèles sont les mêmes qui, lorsque l’autorité est exercée par les bons, se retournent contre elle. Ceux qui font un gâchis de tout le Magistère au nom du Concile Vatican II et du chemin synodal sont les mêmes qui déchirent leurs vêtements devant ceux qui refusent d’accepter la révolution permanente d’Amoris Lætitia et de Traditionis Custodes. Le problème, comme nous le voyons, réside dans la crise de l’autorité, qui n’accepte pas de se soumettre – la première – à l’autorité suprême de Dieu.

Mais comment répondez-vous à ceux qui remarquent que le Christ a été obéissant obéi jusqu’à la mort, et que c’est ce à quoi nous sommes tous appelés ?

Notre Seigneur n’a pas obéi au Sanhédrin, ni aux Grands Prêtres et aux anciens du peuple, qui Lui ont ordonné de ne pas se professer Fils de Dieu et qui, pour cette raison, L’ont condamné à mort. Notre Seigneur a obéi au Père, en buvant jusqu’à la lie la coupe amère de la Passion : non sicut ego volo, sed sicut tu. C’est la véritable vertu de l’obéissance, car elle ne suit les ordres de l’autorité terrestre que si elle agit aux fins qui la légitiment. Tout comme ce n’était pas au Sanhédrin de remettre en question la divinité du Christ, mais plutôt en connaissant les Écritures, de reconnaître en Lui le Messie promis ; de même ce n’est donc pas à la Hiérarchie d’exiger l’obéissance dans les questions qui s’opposent à la Foi ou à la Morale. Nous aussi, suivant l’exemple du Christ et fortifiés par l’avertissement de saint Pierre, nous répétons : Nous devons obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Actes 5, 29).

François a déclaré que les traditionalistes « rejettent Vatican II ». Étant donné que le 14 février 2013, le pape Benoît XVI a déclaré que le Concile avait été détourné par les médias – causant ainsi des dommages incalculables à l’Église et « banalisant la liturgie » – tous les catholiques ne devraient-ils pas « rejeter le Concile » tel qu’il a été présenté au monde, selon Benoît, par les médias ? 

Tout d’abord, il faut préciser que la contribution médiatique au récit conciliaire n’est que partielle et marginale par rapport à la valeur clairement subversive de Vatican II, voulue par ses auteurs. Il n’y a pas un fantomatique « Bon Concile » qui aurait été « trahi » par les modernistes : il a été conçu dans la forme de manière à l’empêcher d’être catholique dans la substance, déguisant les pièges qu’il contenait (et qu’il révélerait bientôt) derrière les verbiages et les concepts équivoques. Si les médias avaient détourné le Concile contre l’intention des Pères et des Papes qui le voulaient, pourquoi face aux déviations répétées véhiculées par la presse aucun d’entre eux n’a réitéré la doctrine catholique ? Si la banalisation de la liturgie dans la période post-conciliaire n’était que la faute des médias, pourquoi aucun évêque n’a-t-il jamais proposé la célébration du Novus Ordo dans la continuité du Vetus, mais a plutôt tiré parti des innovations du rite montinien pour le promouvoir ? Si l’ancienne liturgie ne constituait pas une menace pour la nouvelle, pourquoi cette persécution impitoyable de ceux qui voulaient continuer à célébrer selon la forme ancienne ?

En cela, Bergoglio a parfaitement raison : les catholiques qui veulent rester fidèles à la Tradition rejettent Vatican II précisément parce qu’il est étranger et opposé à la Tradition, qui est la norme de la Foi. Et cela confirme non seulement la catholicité de la Liturgie traditionnelle, mais aussi l’extranéité de la liturgie réformée au développement harmonieux que le culte a connu au cours des siècles, d’où sa non-catholicité substantielle.

Les catholiques ont donc non seulement le droit, mais aussi le devoir d’exiger que l’Église vénère la Très Sainte Trinité de la manière la plus parfaite, et non avec un rite adultéré, né d’esprits doctrinalement et moralement déviants, conçu pour plaire aux hérétiques et diminuer la Foi. Il ne s’agit pas d’« inventer » une liturgie plus catholique que celle du Novus Ordo, mais de réparer le très grave vulnus causé à l’Église par la suppression d’un rite bimillénaire pour le remplacer par une déplorable contrefaçon. Restaurer la Liturgie catholique et interdire la liturgie réformée sera une étape inévitable dans la restauration de l’Église.

Il semble au moins plausible que le pape Bergoglio ait été installé sur la Chaire de Pierre pour saper la théologie de la papauté. Quand nous critiquons François, ne contribuons-nous pas à ce même agenda concernant la papauté ?

Ceux qui ont réussi à faire élire Bergoglio au Conclave de 2013 savaient très bien qu’il obtiendrait comme résultat principal de son installation sur le Trône de Pierre le discrédit de la Papauté et l’humiliation de l’Église catholique, ainsi que la propagation d’hérésies, d’erreurs morales et de scandales très graves. En effet, c’est précisément dans l’action constante de cet individu, dans l’impitoyable œuvre de démolition de ces dix dernières années, que la Papauté a connu l’assaut le plus grave et le plus puissant, mené par celui qui doit son autorité sur le corps ecclésial précisément à la papauté. Une action extérieure n’aurait pas eu les mêmes résultats. Il faut dire aussi que la renonciation de Benoît XVI et le monstrum canonique auquel il a donné naissance avec la « papauté émérite » ont porté un coup mortel à l’Église, permettant de mener à bien le plan contre elle qui prévoyait l’élection d’un pape qui soutiendrait l’agenda de l’élite.

Critiquer Bergoglio pour ce qu’il est en train de faire à l’Église ne fait pas le jeu de ses instigateurs, de la Mafia de Saint-Gall ou de l’élite maçonnique mondialiste qui l’a voulu là-bas. L’indignité de l’Argentin par rapport au Trône de Pierre est, d’autre part, un signe clair de l’action préméditée et malveillante de ceux qui savent bien que le moyen le plus efficace de démolir une institution consiste dans le travail de discrédit effectué par ceux qui en elle détiennent la plus haute autorité. Ce n’est pas différent de ce qui se passe aujourd’hui dans la sphère civile, dans laquelle toute la classe politique et dirigeante est corrompue et soumise aux intérêts criminels de la même élite anti-chrsitique, qui d’une part corrompt les âmes avec la propagande LGBTQ + et la théorie du genre, d’autre part utilise des évêques corrompus – comme cela se produit en Belgique avec les « bénédictions » des unions homosexuelles – pour amener les paroles de Bergoglio aux conséquences extrêmes, en commençant par le « Qui suis-je pour juger ? ».

Je voudrais clarifier une implication extrêmement grave (et inévitable) de cette légitimation progressive de la doctrine LGBTQ + et de l’idéologie du genre dans la vie de l’Église. Nous savons que le Magistère de l’Église condamne les actes contre la nature comme « intrinsèquement pervers » : ils sont mauvais ; celui qui les commet pèche gravement et s’il ne se repent pas, son âme est destinée à la damnation éternelle. L’Écriture Sainte – l’Ancien et le Nouveau Testament – nous le dit sans équivoque. Au contraire, les paroles de Bergoglio et les actes de ses complices visent à éliminer toute condamnation morale de la sodomie et de la pratique du changement de sexe. Mais que se passera-t-il quand, dans quelques années, il y aura des « fidèles » transsexuels qui demanderont à être admis dans les Ordres sacrés ? Je n’ajoute rien d’autre : je vous laisse le soin de comprendre l’abîme qui s’ouvre devant nous.

Quant à ceux qui s’obstinent à distinguer entre ce  que dans le « magistère » bergoglien est contraignant et ce qui ne l’est pas, je pense qu’il n’est pas nécessaire de répéter que cette approche formelle peut peut-être sauver l’infaillibilité papale, mais certainement pas l’image de l’Église, et en même temps démontre la totale extranéité de Bergoglio à la Papauté : elle est instinctivement perçue même par les simples fidèles comme le rejet d’un organe transplanté dans un organisme qui ne le reconnaît pas comme propre. Le sensus fidei leur fait comprendre ce que l’analyse de ses déclarations hérétiques confirme au théologien ou au canoniste. Le fameux « Buonasera » depuis le balcon de la Loggia de Saint Pierre le 13 mars 2013 représente le compendium de cette aliénation irrémédiable.

Vous avez acquis une reconnaissance internationale pour vous être prononcé contre la Grande Réinitialisation. Que dites-vous à vos détracteurs qui prétendent que vous vous engagez dans des théories du complot et que vous devriez simplement dire vos prières et vous taire ?

Je dis mes prières de toute façon, et je ne vois pas pourquoi je devrais manquer à mon devoir d’Évêque et de Successeur des Apôtres, en gardant le silence sur des questions qui sont étroitement liées et complémentaires. Tant que mes critiques visaient la dissimulation des scandales de l’alors cardinal McCarrick ou les déviations doctrinales de Vatican II, l’étiquette de lefebvriste suffisait à me diaboliser devant les fidèles ; mais depuis que j’ai détecté la cohérence entre le coup d’État mondial mené par l’État profond avec l’urgence pandémique d’abord, et ensuite avec l’urgence énergétique, et l’acte non moins subversif de l’élection de Bergoglio organisée par l’église profonde, voici que l’étiquette de théoricien du complot devait être ajoutée invariablement, pour me discréditer devant ceux qui écoutent mes paroles. Le risque, selon eux, est le même : qu’il y ait quelqu’un qui commence à raisonner avec sa propre tête et comprenne qu’il a été victime d’une fraude colossale, au détriment de la vie matérielle avec l’Agenda de Davos, et au détriment de la vie spirituelle avec Vatican II et l’Agenda Bergoglio.

Je voudrais aussi comprendre pourquoi devraient être considérés comme des « théories du complot » les plans subversifs d’organisations privées supranationales – de véritables mafias organisées et enracinées dans les ganglions du pouvoir – qui sont annoncés par leurs propres partisans bien à l’avance et qui représentent l’accomplissement des délires dystopiques de la secte maçonnique. Si la mafia déclare publiquement qu’elle veut exterminer une partie de la population, que je la vois s’organiser pour le faire, et j’assiste à la mise en œuvre de ce projet d’extermination exactement comme annoncé, ce n’est pas moi qui invente des théories du complot, mais la mafia qui se sent si sûre de son succès qu’elle n’a même pas à le cacher, qu’elle a la présomption de pouvoir nous convaincre – en nous considérant comme inférieurs – que notre extermination est désirable et bonne. En fait, il en va de même pour l’idéologie verte de la matrice néo-malthusienne, qui considère l’être humain comme un parasite de la planète : les décisions prises par l’ONU, par l’Union Européenne et par les différents gouvernements sont basées sur le faux prétexte du réchauffement climatique pour légitimer la décarbonisation et l’introduction forcée d’énergies dites durables. Mais c’est précisément un mensonge, une excuse pour forcer les masses à se soumettre à un contrôle total et pour garantir à l’élite un pouvoir et des gains disproportionnés. Et si nous y réfléchissons, même les partisans du Concile ont indiqué comme faux prétexte l’aggiornamento [la mise à jour] de l’Église, alors que le but inconfessable était plutôt sa destruction.

L’État profond et l’église profonde sont les deux faces d’une même fausse pièce de monnaie, parce qu’ils répondent tous deux au même esprit infernal qui hait Dieu à la fois dans la Création et dans la Rédemption, et qui se déchaîne à la fois contre la vie du corps et contre celle de l’âme. Le système, malgré son délire satanique, démontre son efficacité tant que les personnes restent isolées et livrées à elles-mêmes. Inversement, la conscience de ne pas être seul et de partager la même vision du monde et la même Foi ouvre les yeux de beaucoup, leur donne le courage et la force de s’opposer, révèle publiquement la tromperie et unit la résistance. Cela est vrai dans la sphère civile et dans la sphère ecclésiale : ce n’est pas un hasard si la farce pandémique a réuni l’État profond et l’église profonde dans un récit surréaliste et criminel qui a scandalisé les citoyens et les fidèles.

Alors : s’il y a conspiration, pourquoi devrais-je me taire ? Et s’il n’y en a pas, pourquoi se soucient-ils tant des paroles d’un Archevêque âgé ?

Pouvez-vous nous dire quelque chose sur le rôle de notre Reine et du Saint Rosaire en cette période de bouleversements, où beaucoup pourraient perdre l’accès à la Messe elle-même ?

Cet entretien se termine par une référence à la Très Sainte Vierge Marie, Mère de Dieu et à notre Mère, la Toute-Puissante par la grâce. Dans cette lutte d’époque entre la Femme et l’ancien Serpent, le Saint Rosaire est l’arme la plus puissante avec laquelle nous devons apporter notre contribution en tant que milites Christi, en vertu de la Confirmation que nous avons reçue.

Beaucoup d’entre vous ont faim de Vérité et soif de sainteté, biens éternels qui sont mis à notre disposition par le Saint Sacrifice de la Messe que vous avez pu savourer grâce à la résistance de quelques prélats et clercs, et à la décision providentielle de Benoît XVI avec Summorum Pontificum. D’autres ne savent pas ce à quoi ils renoncent parce que ce trésor spirituel leur a été caché et volé pendant trop longtemps, mais s’ils le découvraient ils ne pourraient plus s’en passer. Il est donc de notre devoir, en tant que Catholiques et membres vivants du Corps mystique, d’exiger la restitutio in integrum de la Messe apostolique, et il est du devoir de l’Autorité non seulement de l’accorder comme privilège, mais de la lui reconnaître plein droit de citoyenneté dans l’Église.

Mais pour que cela se produise, il est nécessaire que nous tous nous rendions tous dignes de cette grâce par une vie de sainteté et par un témoignage courageux de la Foi dans laquelle nous avons été baptisés. Ce sera la pratique des vertus et la prière constante du Saint Rosaire qui nous fortifieront sur ce chemin et feront émouvoir avec compassion notre Avocate, afin que, dans le rétablissement du culte public de l’Église du Christ, nous puissions voir une anticipation de la gloire éternelle qui nous est préparée.

Pittsburgh, 2 octobre 2022

©Traduction de F. de Villasmundo pour MPI relue et corrigée par Mgr Viganò

Texte original en anglais : Michael Matt Interviews Archbishop Vigano LIVE at the Catholic Identity Conference

La vidéo de l’intervention en direct de Pittsburgh :

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