Honneur et fidélité
« Là où est l’honneur, là où est la fidélité, là seulement est la patrie. » Louis d’Estouteville pendant la guerre de Cent Ans

Nous vous offrons, Véronique Bordonado et moi le texte du beau prêche de Monsieur l’Abbé Kowalczyk, prêtre d’origine polonaise et ancien aumônier de la Légion, à la messe de Requiem de Jean-Marie Le Pen au Val de Grâce, le 16 janvier 2025.
Frères et sœurs, chère famille, amis de Marie Jean Le Pen, excusez moi, c’est l’émotion quand même, Jean-Marie…
Nous sommes réunis pour rendre hommage et dire A Dieu au cours de cette messe de Requiem à Monsieur Jean Marie Le Pen.
Si j’en suis le prêtre célébrant c’est que sa famille a fait appel à un ancien aumônier militaire et qui plus est, un ancien de la Légion Etrangère. La Légion Etrangère est une grande famille et Jean-Marie Le Pen en a fait partie et à la Légion étrangère on dit : « Légionnaire un jour, légionnaire toujours ».
Je ne connaissais pas Monsieur Le Pen personnellement mais en tant que légionnaire il est mon frère. Cette fraternité doit être notre prière, cette fraternité est prière commune au Père commun et non au jugement parisien de celui qui porte son attention à la paille de son prochain et non à sa propre poutre. Monsieur Le Pen était Breton, Français, d’une famille de pêcheurs dont le père, en son navire, a perdu la vie en raison d’une mine allemande durant la sombre guerre de 1940. Il reste seul orphelin avec sa mère, il est devenu pupille de la nation et puis entreprend des études pas toujours faciles du fait de son caractère rebelle. Le droit était son choix universitaire, son premier domaine de responsabilité politique. Je ne m’étends pas sur les différents engagements politiques successifs de Monsieur Le Pen qui ne sont pas de ma compétence, si ce n’est pour dire qu’ils ont toujours été motivés par l’amour de la France.
Je me permets seulement d’observer qu’avant de prétendre servir la France il faut d’abord l’aimer cela ne suffit pas mais c’est nécessaire. J’inviterais donc tous les spécialistes du jugement à regarder s’ils ont des mains. Je m’explique : Péguy aimait à dire à certains intellectuels de service que certes, ils ont les mains propres, mais c’est parce qu’en réalité ils n’ont pas de mains. Avec vous, je souhaite avant tout m’arrêter sur l’engagement militaire. Monsieur Le Pen tout jeune député abandonne le confort de la chambre des députés et les attraits de l’art oratoire où il fait mouche pour le combat pour la France en Indochine et en Algérie où il y avait plus de coups à prendre que de gloire à récolter ; et cet engagement militaire s’est réalisé sous l’uniforme de la Légion Etrangère sous les valeurs de fidélité, de courage, d’abnégation. Je n’ai pas l’habitude de parler de moi dans une homélie, aujourd’hui je ferai une exception. Arrivé de Pologne à l’âge de 29 ans, je ne parlais pas un mot de français, alors vous m’excuserez mon accent. J’ai donc appris cette belle langue et par un concours de circonstances providentiel je me suis rapidement intégré dans ce pays. Je suis, comme on dit, la première génération d’immigrés celle qui a souvent du mal à se reconnaître, à trouver sa place, à s’identifier, celle dans la plupart des cas qui se révolte tout en profitant du système. Non seulement je me suis intégré et assimilé mais je me suis laissé séduire par le charme, la grandeur de la France. J’aime ce pays. Mon statut d’aumônier militaire m’a permis de dire à maintes reprises de le dire et aussi en toute humilité de le prouver. C’est pour cela aujourd’hui je prie le Seigneur de nous donner le courage à nous tous, à chacun de nous, de prendre conscience de ce qui se passe en France. Je prie le Seigneur de nous donner la Foi, car il n’y a que dans la Foi que notre service, notre sacrifice pour la France prennent tout leur sens. Quand monsieur Le Pen à la Légion Etrangère a appris un chant intitulé le fanion de la légion permettez-moi de vous citer le refrain :
Tu as vu le fanion de la légion ?
On nous appelle les fortes têtes
On a mauvaise réputation
Mais on s’en fout comme d’une musette
On est fier d’être à la légion, à la légion
Et ce qu’ ignore le vulgaire
C’est que du soldat au colon
Ils ont une âme de mousquetaire, les légionnaires.
Oui Monsieur Le Pen vous étiez une forte tête, vous aviez mauvaise réputation, mais vous aviez aussi une âme de mousquetaire, mousquetaire : soldat au service de la France. La qualité principale du soldat : le courage. St Thomas d’Aquin affirme que le courage est la capacité de regarder la mort en face au moment d’une crise. Supporter, c’est-à-dire se tenir debout dans le danger, est un acte plus fort que d’affronter le danger lui-même et selon lui le courage contient la crainte mais modère l’audace. Incontestablement les chrétiens, ceux qui croient en Jésus-Christ sont les disciples d’un homme qui a eu peur au moment de sa mort, mais ne s’est pas pour autant dérobé à sa mission. Ainsi conçu le courage est don de l’Esprit Saint. Sous les drapeaux des régiments de France sont inscrits deux mots : Honneur et Patrie.
En Occident, l’Honneur fut d’abord associé au fait d’être bien né, d’être ainsi capable dans l’action d’une grandeur pouvant dépasser l’exigence du strict devoir. Qu’est-ce que l’honneur ? C’est la force de l’âme animée ou réveillée par le devoir et qui quelquefois même nous porte au-delà de ce qu’il prescrit. Ce sont les paroles de Sainte-Foy. Les honneurs devient ainsi le signe distinctif du rang,de la place occupée dans la hiérarchie sociale.
Le mot Patrie désigne étymologiquement le pays des pères. La France était le pays de la noblesse, l’excellence, il y avait la place pour Dieu. C’était la fille aînée de l’Eglise. Il y avait la place pour la famille, la justice, la vraie justice, celle qui s’ajuste à la volonté de Dieu et à la Légion on a remplacé le mot Patrie par Fidélité.
Fidélité qui signifie la constance dans les affections, les sentiments et plus précisément, c’est la qualité de la personne qui ne manque pas à la parole donnée, à la foi donnée à l’engagement. La Fidélité s’enracine dans une décision qui engage à l’égard de quelqu’un, l’attitude de foi, de confiance. Confiance qui est au cœur de la fidélité qui a un caractère inconditionnel : je te promets fidélité non pas sous telle ou telle condition mais parce que c’est toi. La fidélité se vit par rapport à la durée, au temps, l’histoire. Elle s’appuie sur le souvenir, l’espérance tenant ensemble en quelque sorte le passé, le présent, l’avenir.
Chère famille de Monsieur Le Pen je suis heureux et triste d’être là. Je suis prêtre catholique aujourd’hui curé d’une paroisse. Je crois en Dieu, en la vie éternelle, je crois que la vie a un sens, la joie a un sens, l’amitié a un sens, l’amour a un sens, la justice a un sens, le progrès a un sens, la liberté a un sens, ce que je vis avec vous, avec ma famille, ce que je vis avec mes amis a un sens, tout ceci a un sens, tout ceci vaut d’être vécu. Je pourrais dire aussi là l’injustice, la souffrance, la haine n’ont pas de sens, sont absurdes, incompréhensibles, inadmissibles, révoltantes et je crois que l’au-delà c’est l’infini et Dieu, et Dieu et amour sont infinis.
L’apôtre St-Jean a écrit : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ce qu’on aime ». Je suis heureux d’être là, de penser que Jean-Marie a rejoint l’amour infini de Dieu. Et je suis triste d’être là car je sais qu’il vous manque. C’était votre époux, votre papa, votre Daddy. Il vous a aimés comme vous l’avez aimé, comme vous l’aimez encore, il vous a forgés. Prions donc pour lui. Il était catholique, homme comme nous tous avec ses qualités, avec ses défauts. Son amour pour sainte Jeanne d’Arc témoignait du lien indissociable de l’amour de la France, de ses racines chrétiennes. Gardons-les lui. A qui lui demandait sur quel type de mort se portait son choix, il répondait que c’était celle voulue par Dieu. Que votre volonté soit faite. Jean-Marie mon frère repose en paix.
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