Protégez moi de mes amis. Mes ennemis, je m’en charge.
Il est infiniment désagréable de lire le livre posthume d’un ami et que ce livre soit une potion amère.
Dominique Venner était un ami . Il publie à titre posthume un livre qui va bien au delà de son septicisme habituel à l’égard des catholiques. Je ne peux plus lui répondre et le contredire comme je le faisais dans mon émission de Radio Courtoisie ou après ,au cours d’un bon déjeuner.
Dans Un samouraï d’Occident ,sous titré Le Bréviaire des insoumis , l’écrivain nous livre son testament, sa vision de l’histoire , du « désordre épouvantable » créé par le christianisme dans un monde antique parfait, ses héros tous païens à quelques exceptions près, qui se sont souvent suicidés, son amour pour Homère l’écrivain total qui a tout dit, tout compris de l’homme, qu’on doit suivre à la lettre comme le Coran et ses conseils aux jeunes européens.
L’écriture est très belle, l’érudition impressionnante mais le charme ne passe plus pour les catholiques que nous sommes. Des violences et incohérences trop nombreuses se cachent derrière le masque du sage stoïcien. Et je vais vous en citer quelques unes, cher Dominique pour la dernière fois.
Le monde de l’Antiquité était noble et vertueux, le christianisme a tout gâché selon vous . Les carthaginois massacrés lors des guerres puniques jusqu’au dernier apprécieront. Les romains ont élevé des montagnes de leurs crânes comme Flaubert le raconte dans Salambo. Pas la peine de s’offusquer que Berlin ait été anéanti ! Les Alliés avaient un modèle.
Le christianisme , dites vous a persécuté les païens, éradiquant leur culte et remplaçant leurs dieux et déesses par nos saints. J’ai ouï dire que les viking déferlant sur l’embouchure de la Seine ne se comportèrent pas délicatement, ils ont massacré des monastères entiers. Puis ils épousèrent leurs femmes autochtones qui avaient enlevées lesquelles les ont civilisés. Le chef des francs qui déferlèrent sur la France épousa Clotilde qui le convertit. Ainsi est née la France, petit détail ou importante étape….?
Et puis un peu de logique, s’il faut vénérer, protéger, répandre ses propres traditions, pourquoi se plonger dans la sagesse japonaise et faire de vous un samouraï . Le goût des armes et du combat ne justifie pas tout. Il n’y a pas que l’Orient qui soit compliqué, l’Europe aussi, vous simplifiez à l’extrême, vous caricaturez. Vous n’avez pas trouvé de héros valables dans toute la tradition chrétienne . Dommage!
En plein combat de la Manif pour tous contre tous les Peillons du moment qui veulent éradiquer eux aussi la religion chrétienne , vous lancez votre bombe au milieu de ces jeunes qui ,pour la majorité d’entre eux sont catholiques. D’un côté vous voulez les galvaniser et de l’autre vous les anéantissez en réduisant à rien les soubassements de leur foi.
Votre mère très chrétienne vous a quitté, vous n’étiez qu’un jeune garçon de dix ans. Elle voulait faire de vous un prêtre, vous me l’avez dit. Vous avez été mis dans des pensions catholiques très dures, qui voulaient faire plier votre orgueil. Ils s’y sont mal pris. Ils n’ont réussi qu’à le décupler. Un autre historien, géant spirituel, Soljenitsyne ,jeune militant communiste jeté au goulag par ceux qu’ils croyaient ses frêres d’armes, a reconnu son erreur et a retrouvé la foi de sa mère.
Alexis Carrel dont vous faîtes un beau portrait a écrit des lignes magnifiques en anglais en 41 pour le Reader Digest sur les bienfaits de la prière .Grand médecin il avait été frappé de l’efficacité de la prière pour certains malades. Comme il n’aimait pas la traduction qui en avait été faite il le réécrivit. Le connaissiez vous ? Sans doute pas, on ne peut connaître toutes les richesses de tous les écrivains depuis le début du monde. On peut y trouver ceci : « Comment faut il prier? Nous avons appris la technique de la prière des mystiques chrétiens depuis Saint Paul jusqu’à Saint Benoît et à la foule des apôtres anonymes qui, pendant vingt siècles, ont initié les peuples d’Occident à la vie religieuse. Le dieu de Platon était inaccessible dans sa grandeur. Celui d’Epictète se confondait avec l’âme des choses. Jahveh était un despote oriental inspirant la terreur et non l’amour. Le christianisme au contraire a porté Dieu à portée de l’homme. … L’homme a besoin de Dieu comme il a besoin d’eau et d’oxigène. ….Pour prier il faut seulement faire l’effort de se tendre vers Dieu. » Cet effort vous le refusiez ou peut être l’avez vous fait au dernier moment ,en vous tuant à Notre Dame, aux pieds de la Vierge.
La dernière ligne de votre dernier édito dans la Nouvelle Revue d’Histoire dit « Il ne faut jamais provoquer la colères des mères. » Vous avez sûrement du provoquer celle de la vôtre. Elle vous en parlera. L’Eglise vous a trahi deux fois, dans ces pensions catholiques si sévères et plus tard quand vous étiez en prison et que certains prêtres ,porteurs de valises et d’autres , éditorialistes infâmes choisirent le camp du FLN . Mais l’Eglise est humaine, fragile. Elle a été attaquée par tous ceux que vous considérez comme vos ennemis. Les idées chrétiennes sont devenues folles car elles ont été séparées de la transcendance. Merci pour le texte de Céline terriblement accusateur du christianisme. Je ne le connaissais pas . Sa violence sur le mal fait « aux races viriles devenus mandigots , sous hommes dès le berceau par la littérature christique, » ne traduit que la violence de sa douleur. L’Europe s’engage dans une seconde guerre civile après le premier suicide de la guerre de 14 .Mais sont ce vraiment les chrétiens qui ont préparé ces guerres, … Qui furent envoyés au front pour mourir, dès 14 , en première ligne les paysans bretons, catholique, les officiers français catholiques et le premier d’entre eux Péguy .Idem pour la gurerre de 40 . Qui a été éliminés en 45 ? Une grande partie des élites catholiques N’est ce pas l’éternel guerre contre les catholiques qui continuait. Il faudrait peut être dire le nom des vraies responsables…La France catholique saine et combattante et virile que vous auriez pu aimée a été décapité en 14 18 et de 40 à 45 avec la guerre et l’épuration. Etonnez vous après que la démocratie chrétienne avec son idéologie, ses lâchetés, sa traîtrise ne se soit propagée comme une traînée de poudre.
La violence de Céline est la vôtre. Votre pays se meurt et vous ne le supportez pas. Nous ne le supportons pas non plus mais nous n’accusons pas les mêmes personnes. Et sont ils vraiment des sous hommes, les Rois Catholiques qui ont libéré l’Espagne de l’occupation musulmane.?
J’aurais du vous dire ce que Gustave Thibon disait de Nietzche : « L’homme qui, toute sa vie batailla fiévreusement contre Dieu n’est guère autorisé à déclarer qu’il n’y attachait pas d’importance et qu’il ne perdit jamais son temps à s’en occuper; on prend toujours au sérieux l’adversaire qu’on défit à mort. »
Etrange et signifiante votre admiration pour la gravure de Durer,Le Chevalier, la mort et le diable. Le diable avait il donc une existence pour vous ?
éditions Pierre Guillaume de Roux
Anne Brassié
PS J’ai aimé moi aussi depuis l’enfance l’Illiade et l’Odyssée, les auditeurs en ont entendu dans mon émission des extraits chantés en grec accompagnés d’une sorte de cora grec. Mais maintenant à cause de vous le charme s’en est éteint . Je vais chanter à tue tête l’air du Bouillant Achille d’Offenbach. Vous serez furieux mais vous l’aurez voulu :trop de partialité m’a fait sortir de mes gonds….
Triste, vraiment. Nous sommes pourtant riches de tant d’épopées chrétiennes, et de tant de héros !
C’est donc bien ce que je pensais, il était croyant: on ne peut haïr que ce qui existe.
Il était de toute façon trop intelligent pour ne pas croire.
Et pourtant son dernier acte était tout sauf intelligent.
Sa haine était sans doute encore plus intense que son intelligence.
Il devait donc être dans un état de souffrance constante.
Dieu ait son âme.
Merci beaucoup, Anne, pour ce formidable article. JCG.
Bernanos le disait bien…
« l’Occident n’a pas besoin de samouraï, mais de saints… »
Livres en Famille qui présente cet ouvrage de Dominique Venner ne peut que reproduire cette critique lucide, d’Anne Brassié -ots justes, pensée claire, texte fort… –
à la présentation de l’ouvrage.
http://www.livresenfamille.fr/p8495-dominique_venner_un_samourai_occident.html
Madame,
Quel texte souverain! De votre part, je ne suis pas surpris. Merci de cette hauteur de vue, merci pour vos livres, merci pour la place que vous tenez dans le monde du débat et de la diffusion de la vérité.
Hélas, l’antichristianisme de Dominique Venner comme d’autres représentants de la Nouvelle droite a conduit à la distorsion même de l’histoire. C’est ce que j’avais déjà regretté dans son livre de Jünger, où il passe à côté de l’homme qui n’a cessé de lire la Bible toute sa vie et même pendant les deux guerres pour finalement se convertir et entrer dans l’Eglise catholique.
Vous dites, Madame, que les paysans bretons et les officiers catholiques ont été envoyés en première ligne en 14-18. Voulez-vous dire que ceci aurait été fait intentionnellement ? Si c’est bien le cas, auriez-vous sous la main quelque référence bibliographique sur le sujet ?
Bonjour Mme Brassié,
J’ai lu avec beaucoup d’agacement la première partie de votre propos. Je trouve que vous faites bien trop de cas de « légendes urbaines », comme la « conversion » de Clovis, qui n’avait que des raisons politiques, l’épisode de la bataille de Tolbiac étant un plagiat a posteriori de la fameuse conversion de Constantin au Pont Milvius, ou votre mécompréhension de la culture des vikings.
Le « paganisme » issu du polythéisme indo-européen était une religion qui embrassait tous les aspects de la vie, et donc aussi la guerre, « père de toutes choses » selon Héraclite. Lorsque les Romains, lors de la dernière guerre punique, et alors qu’Hannibal avait failli triompher de Rome quelques décennies auparavant, ont rasé Carthage (pour un temps, car la ville fut ensuite reconstruite par les Romains), ils l’ont fait sans hypocrisie. Ils ne se sont jamais prétendus « humanitaires ».
En revanche, le christianisme s’est présenté comme une religion de l’amour, et a converti les païens par le fer et par le feu. Les évangélistes étaient donc des hypocrites, à la différence des Romains, qui assumaient leur cruauté lorsqu’ils l’estimaient nécessaires. Ils ont ainsi crucifié 6000 esclaves révoltés de Spartacus mais que faisaient donc ces esclaves si ce n’est massacrer les habitants de l’Italie. Le monde n’est pas manichéen, il n’y a pas d’un côté les gentils (si vous me pardonnez l’expression) et d’un autre les méchants. Mais il y a ceux qui pratiquent la bona fides et ceux qui pratiquent la punica fides, et c’est contre ceux-là que s’élevait Dominique Venner.
Il préférait les héros imaginaires de l’Iliade aux saints imaginaires du christianisme. Il préférait sans doute Achille aux pieds légers à Saint Mercure, ce saint qui aurait tué l’empereur Julien dans son dos. Il préférait Cuchulainn et Siegfried à Saint Martin jetant ses armes au sol alors que l’empire était envahi. Il préférait Hypatie à Faltonia Proba, la noble chrétienne qui ouvrit de nuit les portes de Rome aux troupes chrétiennes du germain Alaric en 410 après J.C.
Vous faites l’apologie des souverains chrétiens (XVème siècle) qui chassèrent les maures. Mais vous oubliez les souverains chrétiens (VIIème siècle) qui les firent venir comme mercenaires. D’ailleurs, à chaque fois, l’islam n’est pas venu de lui-même en Europe mais il y a été invité. C’est aussi pour chasser des mercenaires catalans que l’empereur byzantin fit venir des troupes turques ottomanes en Europe, et ceux-ci purent ensuite se bâtir une base arrière à Andrinople (devenue Edirne) d’où ils envahirent les Balkans.
Enfin, j’attire votre attention sur les derniers propos du pape François qui vient d’apporter un soutien appuyé aux migrants africains qui se jettent sur nos côtes, comme à Lampedusa.
Je retiens également que vous interprétez le rejet du christianisme par Dominique Venner comme une sorte d’amour contrarié. Un tel amour engendre de la haine, mais pas du mépris. Or Dominique Venner ne haïssait pas le christianisme, alors qu’il est vrai que Nietzsche avait en revanche un compte à régler avec la religion de son père. A 15 ans, Nietzsche écrivit ainsi le poème « devant le crucifix », poème court qui se résume à « Pauvre fou, reste là haut ! ».
Nietzsche avait la nostalgie des « anciens » dieux. Dominique Venner vivait constamment avec eux. C’est parce que le christianisme a détruit les lumières de l’antiquité, certes pas parfaite mais si supérieure à notre époque, que Dominique Venner et tous les « pères fondateurs » de la « néo-droite » ont appris à regarder objectivement l’histoire spirituelle de notre continent, et apprécié à sa juste mesure la trahison/apostasie de Constantin.
Et quant à ce bolchevisme de l’antiquité qui est revenu à la vie sous la forme de l’Eglise post-conciliaire, et dont le pape François est le fruit le plus représentatif, qui peut encore croire que c’est en se tournant vers ce talisman cruciforme, qui reste à mes yeux le cheval de Troie de l’orient en Europe, que nous trouverons notre salut.
Que vous n’approuviez pas les choix de Dominique Venner, que vous déploriez son évident rejet de la religion chrétienne, je peux parfaitement le comprendre et l’admettre. Mais concevez aussi qu’il avait certainement de très bonnes raisons de penser ainsi et que tous les jours l’Eglise catholique, mais aussi ses cousines réformées et orthodoxes, nous donnent de très bonnes raisons de partager son avis.
Je suis, vous l’aurez compris, de ceux qui pensent sincèrement que c’est en signant à nouveau la « pax deorum », en retrouvant nos dieux ancestraux, qui ont malgré tout une certaine universalité maîtrisée (le soleil est commun à tous les hommes, mais aussi à tous les êtres vivants), qui sont aussi les dieux du cosmos, que l’Europe renaîtra et les Européens avec elle.
Lorsque les Européens sortiront de leur dormition, et ils en sortiront, ils chercheront les responsables qui auront manqué de les emmener jusque dans un ravin. Les marxistes ne s’en relèveront pas. Mais l’Eglise non plus. Telle est en tout cas ma conviction.
Concernant votre article, je dis sincèrement que vous auriez sincèrement pu vous en dispenser. Non qu’il soit mal écrit, non qu’il ne témoigne de vos sentiments à la lecture de l’ouvrage de Dominique, mais parce qu’il ne me paraît pas opportun, alors que Dominique entre aux Champs Elyséens et ne peut plus vous répondre, de lui reprocher une foi sincère envers les Dieux et les Déesses immortelles de l’Europe.
Vous luttez contre l’islam comme nos ancêtres luttaient contre le christianisme. Ne l’oubliez pas.
Bien cordialement.
Vraiment dommage tout ça. Sur la video de son enterrement il y avait le drapeau normand, parce que a dit le commentaire, Monsieur Venner aimait beaucoup cette province où il vivait. Mais l’a-t-il vraiment comprise? J’ai des doutes et ça m’ennuie de le dire. La Normandie s’est faite au cri de guerre de « Dex aie! » et non de « Thor aie! ». Avait-il lu notre cher La Varende? Qu’on le veuille ou non, tous ses héros, Guillaume le Conquérant, Pierre Corneille, l’Amiral Tourville, Charlotte Corday…,sont des héros « Chrétiens » et qui valent le détour. Et que dire du poète Louis Beuve qui s’était proclamé le « dernier Viking Chrétien »…
Un petit souvenir personnel : un jour au cours d’un stage d’arts martiaux avec un maitre japonais, nous lui avions demandé quelle était la différence entre un Samourai et un Chevalier occidental. Pour lui (et c’est un Japonais qui nous l’a dit) il y avait une énorme différence dans le fait que le Chevalier occidental était dédié à la Vierge.
Dans ma prière à la Vierge, j’avais demandé pour Monsieur Venner de l’indulgence, même beaucoup d’indulgence. J’espère que ma prière a été entendue. C’est mon plus grand souhait.
Qu’il repose en Paix.
Tout à fait d’accord, malheureusement il y a de nombreux jeunes qui suivent les « délires » nihilistes qui rejettent le réel en l’enrobant d’une démagogie pernicieuse, de cet auteur qui a néanmoins écrit, quand il collait au réel de l’histoire sans idéologie, des documents de qualité.
Mes réflexions sont évidemment en lien avec les idées développés par D Venner. Cela n’a rien à voir avec la compassion que l’on doit avoir pour tout homme et sa famille dans de telles circonstances.
J’ai réagi de même lorsque j’ai appris son suicide à Notre-Dame de Paris devant des familles et des enfants. J’étais suffoquée. Je ne pourrai plus entrer à Notre-Dame sans penser à ce sinistre événement perpétré au pied de la Vierge. Mon mari et moi achetions régulièrement » La nouvelle revue d’histoire », fort intéressante. Par conséquent, je savais ses opinions, mais j’étais loin de supposer un instant que l’auteur irait aussi loin dans son aveuglement. C’est un geste d’orgueilleux d’autant plus triste que l’homme avait du talent.